Il arrive que Dieu surgisse là où nul ne l’attend, et que sa lumière prenne racine dans un cœur que tous auraient cru lointain. L’Avent nous entraîne précisément dans ce mouvement : aller vers Celui qui vient, mais aussi reconnaître que Dieu précède, appelle, attire parfois les plus inattendus avant même que son peuple ne s’en rende compte. Aujourd’hui, la Parole nous dévoile un Dieu qui ne cesse de rassembler, d’élargir, d’ouvrir. Un Dieu qui appelle bien au-delà des frontières visibles. Un Dieu qui se plaît à surprendre.
Isaïe est l’un de ces prophètes dont la voix semble traverser les siècles sans perdre de sa force. Dans un monde secoué, déchiré, parfois violent, il annonce une vision que rien ne semblait rendre possible : des peuples nombreux montant ensemble vers Jérusalem, attirés par une lumière plus grande que leurs divisions. Isaïe parle d’un Dieu qui instruit tous les peuples, qui fait tomber les armes, qui transforme les nations en chercheurs de paix. Pour Israël, si conscient d’être un peuple élu, ces paroles avaient quelque chose de déroutant : Dieu veut rassembler tous ses enfants, et personne n’est exclu de cette montée vers sa lumière.
Et voici que l’Évangile nous montre cette promesse en train de naître. Un officier romain, étranger, païen, soldat de l’occupant — tout ce qu’un bon croyant aurait spontanément rejeté — s’avance vers Jésus avec une confiance désarmante. Il ne demande pas un signe, il ne revendique rien, il ne se croit pas digne. Il croit simplement que Jésus peut sauver. De cet homme venu d’ailleurs, Jésus dira : « Chez personne en Israël je n’ai trouvé une telle foi. » Une phrase étonnante, bouleversante, presque dérangeante : ce n’est pas le croyant le plus légitime, mais l’étranger, qui ouvre le chemin.
Et soudain, tout ce qu’Isaïe annonçait prend corps. Le Royaume ne se limite pas à une frontière, à un peuple, à une culture. Dieu appelle ceux qui ont le cœur ouvert, parfois avant ceux qui ont tous les signes extérieurs de la foi. L’Avent, déjà, secoue nos réflexes : Dieu ne vient pas seulement vers ceux qui l’attendent soigneusement — il vient vers ceux qui se laissent toucher. Il vient vers l’humilité.
Dans notre spiritualité de Bethléem, cette scène prend encore une profondeur nouvelle. Car Bethléem dit exactement la même chose : Dieu ne choisit ni les puissants, ni les sûrs d’eux, ni les installés. Il naît dans la pauvreté, au milieu de ceux qui ne comptent pas. Il se donne à des bergers, à des étrangers, à des cœurs simples. L’Enfant de la crèche devient ainsi le premier appel lancé à tous les peuples. La lumière n’est pas enfermée dans un temple : elle repose dans une mangeoire, offerte à tous les regards. Dieu choisit la vulnérabilité pour que personne ne se sente trop loin.
L’Avent nous rappelle donc que croire, ce n’est pas se considérer comme déjà arrivé : c’est se laisser rejoindre. Se laisser appeler. Entrer dans ce mouvement d’ouverture où Dieu recueille ceux qui s’approchent de Lui, même timidement, même maladroitement. Le centurion est de ceux-là : il n’a ni la bonne origine, ni les bons rites, mais il a un cœur disponible. Et Dieu reconnaît toujours un cœur disponible.
Peut-être que la question du jour pourrait être celle-ci : où Dieu nous rejoint-il, là où nous pensions ne rien attendre ? Ou encore : quelles portes en nous veut-il ouvrir pour que nous ne manquions pas à son appel ?
Nous sommes un peuple en Avent, un peuple en marche, un peuple qui avance vers la promesse. Mais l’Avent nous apprend aussi à regarder autour de nous ceux que Dieu appelle déjà : les lointains, les discrets, les blessés, les étrangers. L’Enfant de Bethléem ne fait pas de tri : il rassemble.
Prière du jour
Seigneur Jésus,
Toi qui viens sans bruit rencontrer ceux que l’on croyait loin,
élargis notre cœur à la mesure de ton appel.Délivre-nous des frontières que nous dressons,
des jugements qui enferment,
des habitudes qui nous ferment à ta nouveauté.Enfant de Bethléem,
toi qui accueilles dans ta lumière les pauvres, les humbles et les étrangers,
fais de nous un peuple qui rejoint, qui rouvre, qui rassemble.Donne-nous la foi confiante du centurion,
la simplicité des bergers,
la disponibilité de ceux qui t’attendent sans savoir encore te nommer.Que notre marche d’Avent devienne un chemin pour tous,
et que ton Royaume s’élargisse chaque fois qu’un cœur s’ouvre.Amen.
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Comme il en fut aux jours de Noé,
ainsi en sera-t-il lors de la venue du Fils de l’homme.
En ces jours-là, avant le déluge,
on mangeait et on buvait, on prenait femme et on prenait mari,
jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ;
les gens ne se sont doutés de rien,
jusqu’à ce que survienne le déluge qui les a tous engloutis :
telle sera aussi la venue du Fils de l’homme.
Alors deux hommes seront aux champs :
l’un sera pris, l’autre laissé.
Deux femmes seront au moulin en train de moudre :
l’une sera prise, l’autre laissée.
Veillez donc,
car vous ne savez pas quel jour
votre Seigneur vient.
Comprenez-le bien :
si le maître de maison
avait su à quelle heure de la nuit le voleur viendrait,
il aurait veillé
et n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison.
Tenez-vous donc prêts, vous aussi :
c’est à l’heure où vous n’y penserez pas
que le Fils de l’homme viendra. »
Pour lire les lectures du jour, consultez AELF – 1 décembre 2025.
Références bibliques
- Is 2, 1-5
- Mt 8, 5-11






























Comments are closed.