Il y a des jours où nous venons à Dieu seulement avec nos besoins, nos blessures, nos urgences. Et il y a des moments où Dieu nous surprend en allant infiniment plus loin que ce que nous pensions. L’Évangile d’aujourd’hui nous montre un Jésus qui accueille, guérit, relève… puis qui ouvre un horizon inattendu : celui d’un festin donné à tous, même dans le désert. L’Avent est ce temps où Dieu élargit nos attentes et transforme nos manques en promesses.
Dans la première lecture, Isaïe annonce un des textes les plus audacieux de toute l’Écriture : sur sa montagne, Dieu prépare un festin pour tous les peuples, un repas abondant, joyeux, universel. Il ne s’agit pas seulement de nourriture : le prophète voit Dieu « faire disparaître le voile de deuil », « essuyer les larmes », « détruire la mort ». C’est un bouleversement immense : là où le monde ne voit qu’un tombeau ou une impasse, Dieu prépare un banquet. La vision d’Isaïe n’est pas un rêve lointain : c’est une promesse précise, une lumière déjà en marche, une paix qui commence à percer au cœur même des situations les plus sombres.
Et voici que l’Évangile accomplit mystérieusement cette prophétie. Jésus monte sur la montagne, et les foules viennent à lui : boiteux, aveugles, estropiés, muets… tout ce que la vie laisse blessé, égaré, diminué. Jésus guérit sans compter, et la foule s’émerveille. Mais le Christ ne s’arrête pas à la guérison des corps : il voit la faim, la fatigue, la vulnérabilité de chacun. Alors, soudain, quelque chose bascule : « Je suis saisi de compassion pour cette foule. »
Ce mot, compassion, dit tout : un mouvement des entrailles, une tendresse qui ne peut rester immobile. Avec sept pains et quelques poissons, Jésus fait ce qu’Isaïe avait annoncé : il prépare un repas pour tous, et chacun repart rassasié. Ce qui semblait dérisoire devient surabondant. Ce qui était désert devient lieu de communion. Ce qui était manque devient joie.
Dans la spiritualité de l’Enfant de Bethléem, cette scène devient lumineuse. Bethléem signifie « maison du pain ». Et c’est dans ce lieu de pauvreté que Dieu choisira de se donner comme Pain vivant. Jésus nourrit la foule parce qu’il sait qu’il deviendra lui-même nourriture pour l’humanité entière. La compassion qu’il déploie sur la montagne annonce la tendresse silencieuse de la crèche : un Dieu qui se penche, qui s’approche, qui nourrit, qui console, qui essuie nos larmes non par des discours mais par sa présence.
L’Évangile nous invite aujourd’hui à croire que Dieu ne se contente pas de répondre à nos demandes — il ouvre davantage. Il voit ce que nous ne voyons pas, il prépare ce que nous n’osions pas espérer. Là où nous apportons sept pains, il prépare un festin. Là où nous voyons le désert, il fait naître la vie. Là où nous voyons un voile de deuil, il prépare la joie.
L’Avent est ce temps où nous apprenons à laisser Dieu élargir nos attentes. À croire qu’au cœur de nos fatigues, il prépare une table. À laisser sa compassion devenir notre nourriture. À accueillir son geste simple, quotidien, discret, comme le signe d’un Royaume qui vient.
Prière du jour
Seigneur Jésus,
Toi dont la compassion précède nos demandes,
ouvre en nous un espace où ta joie peut entrer.Délivre-nous de la peur de manquer,
des regards trop courts,
des attentes trop petites.Enfant de Bethléem,
maison du Pain,
viens nourrir nos cœurs fatigués,
viens essuyer nos larmes,
viens transformer nos déserts en lieux de partage.Fais disparaître en nous le voile de deuil
et rends-nous capables d’espérance.
Que nos mains deviennent ouvertes,
et nos vies un festin préparé pour les autres.Amen.
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là,
Jésus arriva près de la mer de Galilée.
Il gravit la montagne et là, il s’assit.
De grandes foules s’approchèrent de lui,
avec des boiteux, des aveugles, des estropiés, des muets,
et beaucoup d’autres encore ;
on les déposa à ses pieds et il les guérit.
Alors la foule était dans l’admiration
en voyant des muets qui parlaient, des estropiés rétablis,
des boiteux qui marchaient, des aveugles qui voyaient ;
et ils rendirent gloire au Dieu d’Israël.
Jésus appela ses disciples et leur dit :
« Je suis saisi de compassion pour cette foule,
car depuis trois jours déjà ils restent auprès de moi,
et n’ont rien à manger.
Je ne veux pas les renvoyer à jeun,
ils pourraient défaillir en chemin. »
Les disciples lui disent :
« Où trouverons-nous dans un désert assez de pain
pour rassasier une telle foule ? »
Jésus leur demanda :
« Combien de pains avez-vous ? »
Ils dirent :
« Sept, et quelques petits poissons. »
Alors il ordonna à la foule de s’asseoir par terre.
Il prit les sept pains et les poissons ;
rendant grâce,
il les rompit,
et il les donnait aux disciples, et les disciples aux foules.
Tous mangèrent et furent rassasiés.
On ramassa les morceaux qui restaient :
cela faisait sept corbeilles pleines.
Pour lire les lectures du jour, consultez AELF – 3 décembre 2025.
Références bibliques
- Is 25, 6-10a
- Mt 15, 29-37





























Comments are closed.