Il y a des paroles de Jésus qui renversent silencieusement nos évidences. Elles ne condamnent pas bruyamment, mais déplacent en profondeur notre manière de nous situer devant Dieu. Aujourd’hui, la Parole de Dieu nous révèle que le Royaume ne s’ouvre pas à ceux qui disent « oui » le plus vite, mais à ceux qui acceptent humblement de se laisser convertir.
Dans la première lecture, le prophète Sophonie dresse un portrait sans concession de Jérusalem. La ville s’est installée dans l’orgueil, la suffisance, l’illusion de l’autonomie. Elle n’écoute plus, elle ne se laisse plus reprendre, elle ne fait plus confiance. Et pourtant, au cœur même de ce constat sévère, une promesse surgit : Dieu ne renonce pas à son peuple. Il annonce qu’il laissera subsister « un peuple humble et pauvre » (So 3,12), un reste discret mais vrai, qui cherchera refuge dans le Nom du Seigneur. Le salut, nous dit Sophonie, n’est pas réservé aux puissants ni aux irréprochables, mais à ceux qui reconnaissent leur pauvreté intérieure. Le Seigneur se fait proche de celui qui sait qu’il a besoin d’être relevé. Il écoute le pauvre, il délivre de l’angoisse, il restaure celui qui se laisse toucher.
Cette promesse éclaire l’Évangile du jour. Jésus raconte la parabole des deux fils. Le premier dit non, mais finit par aller travailler à la vigne. Le second dit oui, mais ne fait rien. Par cette image simple, Jésus déplace le centre de gravité : ce ne sont pas les intentions affichées qui comptent, mais le chemin réellement emprunté. Ce ne sont pas les paroles qui sauvent, mais la conversion concrète. Et Jésus ose une parole qui scandalise : « Les publicains et les prostituées vous précèdent dans le Royaume de Dieu » (Mt 21,31). Non parce qu’ils seraient meilleurs, mais parce qu’ils ont cru à la parole de Jean-Baptiste, reconnu leur faute, et changé de route. Ceux que l’on croyait loin sont entrés. Ceux qui se pensaient proches sont restés à la porte.
Dans cette page d’Évangile, Jésus ne humilie personne. Il révèle simplement un paradoxe du Royaume : Dieu ne s’impose jamais à ceux qui se croient justes. Il se donne à ceux qui acceptent d’être petits. Les chefs des prêtres connaissaient l’Écriture, ils avaient dit « oui » en paroles, mais leur cœur ne s’est pas laissé déplacer. Les pécheurs publics, eux, ont osé reconnaître leur misère — et c’est là que la grâce a trouvé un passage.
Dans la spiritualité de l’Enfant de Bethléem, cette vérité est centrale. Dieu ne vient pas chercher des performances spirituelles, mais une pauvreté consentie. L’Enfant de la crèche n’attend pas que tout soit en ordre ; il vient précisément là où quelque chose manque. L’humilité n’est pas un mépris de soi, mais un espace offert. Elle est cette vérité intérieure qui dit : je ne me sauve pas moi-même. Heureux les humbles, non parce qu’ils seraient faibles, mais parce qu’ils laissent Dieu agir. Heureux ceux qui osent revenir à la vigne après avoir dit non. Heureux ceux qui tombent mais se relèvent. Heureux ceux qui cessent de se justifier pour se laisser aimer.
Aujourd’hui, la Parole de Dieu nous appelle sans dureté : non à multiplier les promesses, mais à poser un pas vrai. Non à protéger nos apparences, mais à accueillir la miséricorde. Le Royaume s’ouvre toujours par une porte basse. Et seuls ceux qui acceptent de s’incliner peuvent y entrer.
Prière du jour
Enfant de Bethléem,
toi qui choisis la pauvreté pour rejoindre nos cœurs,
apprends-nous l’humilité qui ouvre à la vie.
Délivre-nous de l’orgueil qui ferme,
des paroles sans lendemain,
des apparences qui rassurent sans convertir.
Donne-nous un cœur simple,
capable de reconnaître ses torts
et de revenir vers toi.
Fais de nous des ouvriers de ta vigne,
non par devoir,
mais par amour.
Amen.
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là,
Jésus était entré dans le Temple,
et, pendant qu’il enseignait,
les grands prêtres et les anciens du peuple
s’approchèrent de lui et demandèrent :
« Par quelle autorité fais-tu cela,
et qui t’a donné cette autorité ? »
Jésus leur répliqua :
« À mon tour, je vais vous poser une question, une seule ;
et si vous me répondez,
je vous dirai, moi aussi, par quelle autorité je fais cela :
Le baptême de Jean, d’où venait-il ?
du ciel ou des hommes ? »
Ils faisaient en eux-mêmes ce raisonnement :
« Si nous disons : “Du ciel”,
il va nous dire :
“Pourquoi donc n’avez-vous pas cru à sa parole ?”
Si nous disons : “Des hommes”,
nous devons redouter la foule,
car tous tiennent Jean pour un prophète. »
Ils répondirent donc à Jésus :
« Nous ne savons pas ! »
Il leur dit à son tour :
« Moi, je ne vous dis pas non plus
par quelle autorité je fais cela.
Pour lire les lectures du jour, consultez AELF – 16 décembre 2025.
Références bibliques
- So 3, 1-2.9-13
- Mt 21, 28-32






























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