CHAQUE JOUR LA PAROLE DE DIEU
Mar 05

La Mission, une écoute mutuelle

De la Chine …

Le 19 mars 1926, les Pères P. Hugentobler et E. Imhof arrivent à Qiqihar, en Mandchourie, au Nord de la Chine. C’est le début de l’engagement de la Société Missionnaire de Bethléem (SMB), constituée en Société de vie apostolique en 1921. Les confrères seront soutenus par des Sœurs de la Sainte Croix d’Ingenbohl, en particulier dans les domaines des soins et de l’éducation (écoles catholiques). L’orientation de cet engagement missionnaire est clairement la « conversion de païens ». Six autres confrères vont suivre assez rapidement. Mais la situation politique est difficile. Les autorités civiles voient ces étrangers d’un mauvais œil. À leurs yeux, les missionnaires sont perçus comme des colonisateurs, imposant une religion occidentale. Nos confrères doivent donc s’habiller comme tout le monde et exercer un métier manuel : ils travailleront donc comme paysans, maraîchers. C’est ainsi qu’ils exerceront leur travail pastoral en formant des communautés vivantes jusqu’à leur expulsion dans les années 1950 sous le régime communiste. Mais, entretemps, ils auront manifesté une présence solidaire comme bons bergers du troupeau. Ils auront montré un témoignage impressionnant ; car il ne faut pas oublier qu’au fur et à mesure, la pression des autorités locales devient de plus en plus intolérable, dans le but d’éliminer toute religion.

En 1951, la Chine fonde une Église nationale, indépendante du Saint-Siège, ce qui rend la vie pastorale quasiment impossible. Les missionnaires sont de plus en plus isolés, les lettres de l’étranger sont confisquées ; ils seront jugés sommairement par les tribunaux populaires jusqu’à leur expulsion du pays.

… à la Colombie

Nos confrères, en pleine force de l’âge, ne veulent pas rester en Suisse. Après un temps de repos et de remise en forme, ils souhaitent repartir en mission. C’est ainsi que certains iront à Taiwan, une mission proche de la Chine, non seulement géographiquement, mais aussi culturellement (langue, religions, animisme chez les autochtones…). D’autres confrères partiront pour la Colombie. L’idée était de s’engager pour un certain temps avec l’espoir, à l’époque, de pouvoir retourner en Chine, ce qui ne put bien sûr jamais se faire.

La Colombie, du point de vue Église et mission, était foncièrement différente de la Chine. En effet, ce pays, comme toute l’Amérique latine, fut christianisée dès le 16e siècle. On pourrait donc parler d’une ‘vieille’ chrétienté… mais, dans les endroits reculés, là où les confrères s’engagèrent, les communautés étaient délaissées et peu évangélisées. De plus, la hiérarchie ecclésiale était réservée à l’élite du pays qui ne voulait surtout pas de changement structurel.

C’est en novembre 1953 qu’arrivent nos confrères dans le pays. La Cordillère manque de prêtres, car les autochtones préfèrent les lieux accessibles aux moyens de transport. Sociologiquement parlant, la société colombienne compte 3 couches de population. Certains voulaient liquider les deux partis traditionnels et les structures de l’Église par la même occasion, car trop influencée par l’Occident bourgeois. Il souffle un vent de révolution avec le célèbre prêtre colombien Camilo Torres qui prend les armes pour la lutte contre l’hégémonie des riches. Ainsi, nos confrères doivent subir maints désagréments physiques : longues randonnées à cheval, routes périlleuses, isolation géographique. Le courrier prend parfois plusieurs mois pour leur parvenir. Ils sont considérés comme demi-missionnaires, bouche-trous… mais il n’empêche qu’en 1967, ils ne sont pas moins de 14.

Quelle mission …

L’activité missionnaire consiste alors en divers services liturgiques, à la visite des différents villages de la paroisse et à la formation des jeunes. Divers besoins matériels se font sentir : construction de ponts, fontaines d’eau potable, réfections des bâtiments appartenant à l’Église. Citons quelques évènements qui ont marqué cet engagement missionnaire : D’abord le Concile Vatican II (1962-1965) dont le décret sur la mission ouvre la voie à d’autres aspects de la mission (nouvelle évangélisation, mission interne …) ; ce qui donne à la pastorale de ‘vieille’ chrétienté le statut de MISSION. La rencontre les évêques latino-américains (CELAM) à Medellin en 1968 ouvre la voie à « l’option préférentielle pour les pauvres ». En 1975 et 1982 eurent lieu des chapitres régionaux qui mirent en perspective la mission ‘traditionnelle’ avec les besoins nouveaux qui seront accomplis par des laïcs.

Père Ernst Peter Heiniger