CHAQUE JOUR LA PAROLE DE DIEU
Juin 14

L’école en Mandchourie

Pour conclure notre volet sur les débuts de l’œuvre de la Société Missionnaire de Bethléem en Mandchourie, nous vous proposons aujourd’hui deux plages de vie des écoles tenus par les religieux.

Sœur Francisca Jung nous rapporte comment se déroule l’enseignement dans l’école supérieure des filles à Tsitsikar. Leurs huit écolières semblent se débrouiller merveilleusement bien avec le catéchisme, l’écriture chinoise, la couture, le tricot et la broderie mais montrent plus de difficultés avec le chant. Ainsi que l’explique sœur Francisca :

« Le chant n’est pas exclu de leur programme scolaire ; au lieu de chant, il faudrait dire soupir, car chaque fois que cet exercice est en perspective, nos élèves se sentent un poids bien lourd sur le cœur. C’est qu’elles n’y ont guère d’aptitudes, ni de goût. Mais avec du temps, et de la patience, cela viendra ! »

Du côté des garçons, le Père Lebbe partage une touchante anecdote, survenue à l’école de Tientsin en 1929. Les parents du jeune Tchan-Mao-Lin ont décidé d’inscrire leur fils unique, âgé de dix ans, dans cet établissement catholique. Demeurant païens, ils estimaient cependant que celui-ci offrait une meilleure formation que l’école païenne.

Les premiers jours, la rencontre avec ses camarades, la découverte des nouveaux livres et l’enseignement de l’écriture occupe tout le temps et tout l’esprit de notre jeune Tchan-Mao-Lin. Les jours suivants, ses yeux, ses oreilles et son cœur s’ouvrent aux paroles de son professeur —«un de ces vieux chrétiens qui aiment les âmes»— et il y découvre une lumière insoupçonnée.

Décidé, il prend la ferme résolution de devenir chrétien mais garde secret ce grand projet. Il achète un catéchisme pour l’étudier mais malheureusement, ses parents remarquent rapidement l’ouvrage au milieu des livres d’école. Ne pouvant accepter la conversion de leur fils unique à la religion maudite des étrangers, le père furieux ramasse le catéchisme et le jette dehors en pleine rue. Cette démonstration de colère ne suffit cependant pas à détacher Tchan-Mao-Lin de son dessein.

Plus résolu que jamais, il met en place une stratégie pour arracher le consentement de ses parents, s’en prenant directement à ce qu’ils affectionnent le plus : lui-même. Tant qu’ils refuseront qu’il devienne chrétien, il ne mangera ni ne boira et économisera ainsi de l’argent pour l’achat d’un nouveau catéchisme…

Son professeur, ignorant tout de cette décision, constate néanmoins avec surprise que le jeune Tchan-Mao-Lin n’est pas rentré à la maison lors de la pause de midi le lendemain. S’inquiétant pour le jeune chinois, il fait valoir la confiance qu’il existe entre les deux et Tchan-Mao-Lin lui raconte finalement toute l’histoire. À la fin du récit, la porte de la salle de classe s’ouvre dans un grand fracas, laissant apparaître le père du jeune Tchan tremblant d’inquiétude. Sitôt retrouvé sitôt pardonné, c’est entendu le petit sera chrétien…

« Ce n’est pas tout, et voici qui est merveilleux comme la grâce : le fameux catéchisme, jeté comme un vieux soulier, a été ramassé par une main curieuse ; l’homme qu’il a parcouru toute une nuit y a vu toutes les belles choses qu’y trouvait l’enfant de dix ans et il est venu dire à son père que lui aussi il voulait le pain de cette vie et qu’il se faisait chrétien. »

Benoît Dénervaud