Entre veille et confiance, Jésus nous appelle à une fidélité qui regarde l’avenir avec espérance. La vigilance chrétienne n’est pas peur du lendemain, mais ouverture au don du Royaume, déjà offert au « petit troupeau ». Aujourd’hui, à la lumière des lectures, apprenons à tenir nos lampes allumées et nos cœurs disponibles. « Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. » (Lc 12, 37)
Dans la lecture de l’Ancien Testament : un peuple qui veille dans la nuit
Le Livre de la Sagesse rappelle la nuit pascale, « préfigurée à nos pères », où les justes avancent dans la confiance, soutenus par les promesses (Sg 18, 6-9). Le peuple n’est pas sauvé par ses calculs, mais par l’initiative de Dieu : une mémoire de salut qui fonde la vigilance d’aujourd’hui. Cette veille biblique n’est ni crispation ni superstition ; elle se fait gratitude et obéissance, cette posture intérieure qui laisse Dieu conduire. C’est déjà l’écho lointain de l’appel de Jésus : « Restez en tenue de service… Soyez comme des gens qui attendent leur maître » (Lc 12, 35-36).
Dans l’épître : la foi qui marche, espère et consent
La Lettre aux Hébreux définit la foi comme « la garantie des biens qu’on espère, la preuve des réalités qu’on ne voit pas » (He 11, 1). Abraham y devient l’icône d’une fidélité ouverte : il part « sans savoir où il va », il accueille la promesse, il apprend à confier jusqu’à ce qu’il a de plus cher (He 11, 8-19). La foi n’est pas immobile : elle se met en route, consent à l’inédit, et découvre, chemin faisant, la solidité des promesses de Dieu.
Dans l’Évangile : fidélité qui espère, espérance qui sert
Jésus parle en parabole d’une maison éveillée, d’un intendant fidèle, d’un cœur rattaché à un trésor qui ne s’use pas : « Sois sans crainte, petit troupeau : votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume » (Lc 12, 32). Il nous apprend une veille faite de confiance : « Car là où est votre trésor, là aussi sera votre cœur » (Lc 12, 34). La vigilance évangélique n’est pas nostalgie du passé, mais disponibilité à l’avenir de Dieu : « Heureux ces serviteurs… c’est [le Maître] qui… passera pour les servir » (Lc 12, 37). Et elle se vérifie dans le service : « À qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup » (Lc 12, 48).
Fidélité ouverte sur l’avenir : voilà l’espérance
La petite parabole de l’évangile du jour est une leçon à la fois de fidélité et d’espérance. En effet, Dieu se sert du temps qui nous est offert ici-bas pour nous conduire à la découverte de son amour.
Les premiers disciples de Jésus, par exemple, n’ont pu reconnaître l’ampleur de sa mission au fur et à mesure qu’ils en vivaient eux-mêmes. Pour eux, la vigilance ne consistait pas à rester accrochés au passé glorieux d’Israël, mais à s’ouvrir sur l’avenir en accueillant les perspectives neuves que Jésus, par sa parole et ses actes, leur faisaient découvrir. Une fidélité ouverte sur l’avenir : voilà donc ce qu’est l’espérance. (cf. Lc 12, 35-37, 40)
Cela nous concerne de près. Les desseins de Dieu sont sans repentance et cette réalité fonde notre fidélité. Cependant, il est clair que nous ne connaissons jamais qu’une partie de ce que Dieu a projeté sur chacun de nous dans son dessein d’amour. Ni des jeunes qui se marient, ni les parents qui accueillent leur petit enfant, ni les jeunes religieux et religieuses qui consacrent leur vie par des vœux ne savent exactement à quoi ils s’engagent. Toutefois, ils en savent assez pour faire confiance à Dieu et à l’avenir qu’il leur prépare. Dès lors, leur fidélité ne doit pas être une crispation sur ce qu’eux-mêmes ont pu rêver à leur point de départ, mais, dans la clarté et la loyauté envers leurs engagements, elle doit devenir une ouverture à tout ce que Dieu veut déployer dans la durée de leur vie. Cette disposition constitue une fidélité à l’avenir, un accueil de l’espérance. (cf. He 11, 1-2.8-19)
Toutefois, une authentique espérance n’est possible que si elle s’enracine dans la force du Christ, notre Sauveur. Cette force ne saurait nous manquer si nous la lui demandons avec insistance. En définitive, notre fidélité profonde et notre espérance sont garanties par la fidélité du Christ à ses disciples. Lorsqu’il a choisi quelqu’un pour en faire son ami, ce choix est irréversible et, quand cela s’avère nécessaire, son pardon demeure toujours offert. Ainsi, il a pardonné à son apôtre Pierre après son reniement et l’a confirmé dans sa mission.
Saint Paul put ainsi écrire : « Si nous manquons de foi, lui reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même » (2 Tm 2, 13). Nous le voyons : c’est dans la certitude de la miséricorde de Dieu, dans l’humilité de la fidélité et la joie de l’espérance que nous devons nous préparer pour l’heure où le Fils de l’Homme viendra : « Vous aussi, tenez-vous prêts » (Lc 12, 40). Cette venue sera alors notre bonheur parfait et éternel avec Jésus, car lui-même « la ceinture autour des reins, les fera prendre place à table et passera pour les servir » (Lc 12, 37).
Dans la spiritualité de l’Enfant de Bethléem, la veille n’est pas tension nerveuse, mais simplicité confiante. Comme l’enfant qui attend, nous apprenons la petite fidélité : gestes quotidiens, service discret, cœur pauvre attaché à un trésor qui ne rouille pas. La maison éveillée de l’Évangile, c’est notre communauté, nos familles, nos engagements : lampes allumées, ceintures serrées, non pas par peur, mais par amour. Là, le Maître se fait Serviteur ; et nous, petits, nous devenons disponibles à sa venue.
-
Choisons un acte de service concret et caché aujourd’hui (visite, coup de fil, pardon, partage) : une veille qui aime.
-
Déplaçons notre « trésor » : un temps quotidien pour la Parole, une aumône régulière, une fidélité simple à la prière. « Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas… un trésor inépuisable dans les cieux » (Lc 12, 33).
-
Prions pour une vigilance joyeuse : non la peur du voleur, mais l’attente de l’Ami.
Prière du jour
Seigneur Jésus,
toi qui dis au petit troupeau : « Sois sans crainte » (Lc 12, 32),
mets en nous la fidélité simple de l’Enfant de Bethléem :
des lampes allumées, un cœur pauvre, des mains prêtes à servir.
Que notre espérance s’enracine dans ta promesse,
et que, veillant dans la nuit, nous préparions ta venue
par la douceur, le partage et la joie du Royaume.
Amen.
Références bibliques
- Sg 18, 6-9
- He 11, 1-2.8-19
- Lc 12, 32-48
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Sois sans crainte, petit troupeau :
votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume.
Vendez ce que vous possédez
et donnez-le en aumône.
Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas,
un trésor inépuisable dans les cieux,
là où le voleur n’approche pas,
où la mite ne détruit pas.
Car là où est votre trésor,
là aussi sera votre cœur.
Restez en tenue de service,
votre ceinture autour des reins,
et vos lampes allumées.
Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces,
pour lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera à la porte.
Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée,
trouvera en train de veiller.
Amen, je vous le dis :
c’est lui qui, la ceinture autour des reins,
les fera prendre place à table
et passera pour les servir.
S’il revient vers minuit ou vers trois heures du matin
et qu’il les trouve ainsi,
heureux sont-ils !
Vous le savez bien :
si le maître de maison
avait su à quelle heure le voleur viendrait,
il n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison.
Vous aussi, tenez-vous prêts :
c’est à l’heure où vous n’y penserez pas
que le Fils de l’homme viendra. »
Pierre dit alors :
« Seigneur, est-ce pour nous que tu dis cette parabole,
ou bien pour tous ? »
Le Seigneur répondit :
« Que dire de l’intendant fidèle et sensé
à qui le maître confiera la charge de son personnel
pour distribuer, en temps voulu, la ration de nourriture ?
Heureux ce serviteur
que son maître, en arrivant, trouvera en train d’agir ainsi !
Vraiment, je vous le déclare :
il l’établira sur tous ses biens.
Mais si le serviteur se dit en lui-même :
‘Mon maître tarde à venir’,
et s’il se met à frapper les serviteurs et les servantes,
à manger, à boire et à s’enivrer,
alors quand le maître viendra,
le jour où son serviteur ne s’y attend pas
et à l’heure qu’il ne connaît pas,
il l’écartera
et lui fera partager le sort des infidèles.
Le serviteur qui, connaissant la volonté de son maître,
n’a rien préparé et n’a pas accompli cette volonté,
recevra un grand nombre de coups.
Mais celui qui ne la connaissait pas,
et qui a mérité des coups pour sa conduite,
celui-là n’en recevra qu’un petit nombre.
À qui l’on a beaucoup donné,
on demandera beaucoup ;
à qui l’on a beaucoup confié,
on réclamera davantage. »
Pour lire les lectures du jour, consultez AELF – 10 août 2025.
Pour méditer
- Comment, très concrètement, gardons-nous nos « lampes allumées » (prière, Parole, service) ?
- Où est aujourd’hui notre trésor — et comment déplacer notre cœur vers le Royaume (Lc 12, 34) ?
- Quelle décision simple prenons-nous pour devenir des intendants « fidèles et sensés » (Lc 12, 42) ?
Comments are closed.