Il existe mille manières d’aimer Dieu… et mille manières de se tromper en croyant Le servir. La liturgie d’aujourd’hui nous place devant des scènes déroutantes : d’un côté, la violence radicale de Mattathias ; de l’autre, les larmes de Jésus devant Jérusalem. Entre ces deux attitudes, un même appel surgit : discerner quel attachement au Seigneur habite vraiment notre cœur. Est-il façonné par la peur, par la colère… ou par l’amour ?
La liturgie du jour nous surprend par la juxtaposition de récits qui, à première vue, semblent inconciliables. Dans la première lecture, tirée du Premier Livre des Maccabées (1 M 2,15-29), nous assistons à une scène de violence religieuse : Mattathias, prêtre fidèle à l’Alliance, se révolte contre ceux qui veulent forcer le peuple à abandonner la Loi. Sous l’effet d’un zèle brûlant, il prend l’épée, frappe, tue, et entraîne avec lui ceux qui veulent rester fidèles au Seigneur. Son geste est brutal, radical, choquant pour nos sensibilités modernes. Et pourtant, pour Israël à cette époque, il signifiait une résistance vitale contre l’effacement de la foi.
Le texte ne nous invite pas à imiter Mattathias, mais à comprendre une vérité spirituelle : l’attachement au Seigneur prend des formes très différentes selon les époques, les caractères et les circonstances. Dans la Bible, les traces humaines sont visibles : peurs, colères, réactions excessives, mais aussi fidélité, courage et passion pour Dieu.
Quand nous arrivons à l’Évangile selon saint Luc (19,41-44), la tonalité change radicalement. Jésus, arrivé en vue de Jérusalem, « pleure sur la ville ». Non pas de colère, mais de tristesse. Non pas pour l’endurcir, mais pour l’attendrir. Non pas pour condamner, mais pour avertir. Il dit : « Si toi aussi, tu avais reconnu ce qui donne la paix ! » Et encore : « Tu n’as pas reconnu le moment où Dieu te visitait. »
Voilà le véritable drame : la ville élue ne reconnaît pas la visite de Dieu. Pire encore : elle refuse l’amour, rejette la paix, ferme les yeux devant la lumière. Jésus n’est ni guerrier ni vengeur : il est un Messie blessé par le refus de l’amour.
Les deux textes du jour semblent contradictoires, mais ils posent ensemble la même question : quand disons-nous aimer Dieu, que mettons-nous réellement derrière cet amour ? Mattathias exprime un attachement par le combat : il défend la Loi avec force et radicalité. Jésus exprime un attachement par la compassion : il pleure devant un peuple qui s’enferme dans son refus.
Ces deux attitudes révèlent deux manières de réagir face au mal : l’une se crispe, l’autre s’ouvre. Et Jésus, par ses larmes, dévoile la vraie réponse du cœur de Dieu : la paix, la compassion, l’appel à la conversion.
La question devient alors : Quel attachement au Seigneur habite nos propres réactions ? Est-ce un attachement inquiet, qui veut tout contrôler ? Un attachement violent, qui veut “défendre Dieu” ? Un attachement passif, incapable de se décider ? Ou bien un attachement humble et aimant, celui qui laisse Dieu façonner notre cœur selon le sien ?
Quand nous contemplons l’Enfant de Bethléem, tout se clarifie. Dieu n’a pas choisi le chemin de la puissance, ni celui des armes, ni celui de l’écrasement.
Il a choisi la vulnérabilité, la douceur, la discrétion d’une crèche. C’est là que Dieu révèle comment Il souhaite être “défendu” : non par la force, mais par la sainteté d’un cœur transformé. L’Enfant de Bethléem ne conquiert pas : il attire. Il ne commande pas : il offre. Il ne domine pas : il se donne.
À la lumière de cette douceur divine, nous comprenons que le véritable attachement au Seigneur ne consiste pas à imposer Dieu, mais à le reconnaître dans la manière dont nous aimons, pardonnons, veillons, relevons.
Ce que Jésus reproche à Jérusalem, ce n’est pas d’avoir manqué de ferveur religieuse, mais d’avoir manqué d’amour. Elle n’a pas reconnu le Dieu qui vient non pour écraser, mais pour visiter. Et peut-être, oui : Jésus pleure chaque fois que du sang est versé “au nom de Dieu”, ou chaque fois que l’on prétend Le servir en blessant l’autre.
Les lectures d’aujourd’hui nous invitent à :
— laisser Dieu purifier notre zèle
— nous demander si notre manière de “défendre” Dieu reflète vraiment son cœur
— reconnaître les visites de Dieu qui passent souvent dans la douceur
— choisir la voie de la paix lorsque surgit la colère
— laisser l’Enfant de Bethléem rendre notre cœur humble, simple, non violent
— nous attacher à Jésus non par la force, mais par l’amour
L’attachement authentique au Seigneur est celui qui fait grandir la paix, d’abord en nous, puis autour de nous.
Prière du jour
Seigneur Jésus,
Toi qui pleures sur Jérusalem
et sur tous nos refus d’amour,
viens purifier notre attachement à toi.
Délivre-nous d’un zèle qui blesse,
d’un amour qui contrôle,
d’une foi qui se ferme.
Apprends-nous la douceur,
la clarté du cœur,
la simplicité confiante qui reconnaît ta visite.
Rends-nous artisans de paix
et témoins fidèles de ta compassion.
Amen.
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là,
lorsque Jésus fut près de Jérusalem,
voyant la ville, il pleura sur elle, en disant :
« Ah ! si toi aussi, tu avais reconnu en ce jour
ce qui donne la paix !
Mais maintenant cela est resté caché à tes yeux.
Oui, viendront pour toi des jours
où tes ennemis construiront des ouvrages de siège contre toi,
t’encercleront et te presseront de tous côtés ;
ils t’anéantiront,
toi et tes enfants qui sont chez toi,
et ils ne laisseront pas chez toi pierre sur pierre,
parce que tu n’as pas reconnu
le moment où Dieu te visitait. »
Pour lire les lectures du jour, consultez AELF – 20 novembre 2025.
Références bibliques
- 1 M 2, 15-29
- Lc 19, 41-44
Pour méditer
- Quel attachement au Seigneur guide nos choix aujourd’hui ?
- Où Dieu me visite-t-il sans que je le reconnaisse ?
- Quelle forme de douceur ou de paix suis-je appelé à témoigner ?





























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