Pour nous aider à mieux percevoir la Parole de Dieu en ce dimanche, l’Évangile de saint Luc et la lettre de saint Paul à Timothée nous placent devant un paradoxe. D’un côté, Jésus condamne l’attitude orgueilleuse du pharisien satisfait de lui-même ; de l’autre, saint Paul semble, lui aussi, parler de ses propres mérites. Mais la différence entre ces deux figures révèle le vrai chemin de la conversion : reconnaître que tout vient de Dieu.
La prière du juste et celle du pauvre
Dans l’Évangile de ce jour (Lc 18, 9-14), Jésus s’adresse « à certains qui étaient convaincus d’être justes et méprisaient les autres ». Deux hommes montent au Temple pour prier : un pharisien et un publicain.
Le premier se félicite de ses œuvres :
« Mon Dieu, je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes … Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne. » (Lc 18, 11-12)
Honnête et discipliné, il accomplit la Loi, mais sa prière se replie sur lui-même. Il parle à Dieu sans l’écouter, se juge supérieur et se justifie par ses propres efforts. Le publicain, au contraire, reste à distance ; il n’ose même pas lever les yeux au ciel :
« Mon Dieu, montre-toi favorable au pécheur que je suis ! » (Lc 18, 13)
Jésus déclare alors :
« Quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste. » (v. 14)
Le message est clair : le cœur humble est le lieu où Dieu peut agir. La vraie justice ne vient pas de nos mérites, mais de la grâce que nous accueillons.
Le paradoxe de saint Paul
Le texte de saint Paul à Timothée (2 Tm 4, 6-8.16-18) semble, à première vue, contredire cet enseignement. Paul dit :
« J’ai mené le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi. » (v. 7)
Ses mots peuvent rappeler l’attitude du pharisien. Pourtant, à la différence de ce dernier, Paul attribue tout à Dieu :
« Le Seigneur, lui, m’a assisté ; il m’a rempli de force. » (v. 17)
Saint Paul reconnaît que sa fidélité est d’abord œuvre de la grâce. Ce n’est pas lui qui a gagné la couronne, c’est Dieu qui la lui offre :
« Le Seigneur me sauvera et me fera entrer dans son Royaume céleste. À lui la gloire pour les siècles des siècles ! » (v. 18)
Voilà la grande différence entre la fierté du saint et celle de l’orgueilleux : l’un s’élève lui-même, l’autre laisse Dieu l’élever.
Conversion et renversement intérieur
Ce renversement, Paul l’a vécu sur le chemin de Damas : passer du “Qu’est-ce que je peux faire pour Dieu ?” au “Comment permettre à Dieu de faire en moi ce qu’il désire ?”. La conversion, c’est ce passage du “moi” à “lui” ; de la performance à la confiance ; du mérite à la gratitude. Comme le publicain du Temple, le chrétien découvre qu’il ne peut être sauvé que par la miséricorde. Cette reconnaissance ouvre la porte à la paix intérieure et à la joie.
Dans la spiritualité de l’Enfant de Bethléem, la grandeur de Dieu se révèle dans l’humilité. Le Christ, « l’Image du Dieu invisible », s’est fait petit enfant pour nous apprendre la vérité du cœur simple.
Le pharisien représente celui qui se dresse devant Dieu ; le publicain, celui qui s’abaisse pour être relevé. Dans nos vies aussi, Dieu ne peut agir que dans la mesure où nous consentons à être pauvres, ouverts, disponibles. La sainteté ne consiste pas à multiplier les œuvres, mais à laisser la grâce nous transformer, pas à pas, dans la confiance et la douceur.
Comme le publicain, reconnaissons notre faiblesse ; comme Paul, confessons la force de Dieu en nous. La prière véritable ne dresse pas un bilan de mérites : elle s’ouvre à la présence. Jésus nous invite à descendre du Temple de notre orgueil pour revenir à la maison du Père, réconciliés et apaisés. C’est là que nous devenons justes, non par nos œuvres, mais par son amour.
Prière du jour
Seigneur Jésus,
Toi qui t’es abaissé jusqu’à la crèche de Bethléem,
donne-nous la simplicité du publicain et la confiance de saint Paul.
Délivre-nous de l’orgueil spirituel,
et fais de nous des témoins de ta grâce.
Que notre vie devienne un lieu d’accueil pour ton œuvre d’amour.
Amen.
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là,
à l’adresse de certains qui étaient convaincus d’être justes
et qui méprisaient les autres,
Jésus dit la parabole que voici :
« Deux hommes montèrent au Temple pour prier.
L’un était pharisien,
et l’autre, publicain (c’est-à-dire un collecteur d’impôts).
Le pharisien se tenait debout et priait en lui-même :
‘Mon Dieu, je te rends grâce
parce que je ne suis pas comme les autres hommes
– ils sont voleurs, injustes, adultères –,
ou encore comme ce publicain.
Je jeûne deux fois par semaine
et je verse le dixième de tout ce que je gagne.’
Le publicain, lui, se tenait à distance
et n’osait même pas lever les yeux vers le ciel ;
mais il se frappait la poitrine, en disant :
‘Mon Dieu, montre-toi favorable au pécheur que je suis !’
Je vous le déclare :
quand ce dernier redescendit dans sa maison,
c’est lui qui était devenu un homme juste,
plutôt que l’autre.
Qui s’élève sera abaissé ;
qui s’abaisse sera élevé. »
Pour lire les lectures du jour, consultez AELF – 26 octobre 2025.
Références bibliques
- Si 35, 15b-17.20-22a
- 2 Tm 4, 6-8.16-18
- Lc 18, 9-14
Pour méditer
- Comment puis-je, à la manière de saint Paul, reconnaître l’action du Seigneur dans mes combats ?
- En quoi la spiritualité de Bethléem m’invite-t-elle à m’abaisser pour laisser Dieu agir ?




























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